François Biltgen présente les grandes lignes du nouveau projet de concept pénitentiaire du gouvernement

Consécutivement à une réunion avec la Commission juridique à la Chambre des députés, le ministre de la Justice François Biltgen a présenté le 17 mars 2010 lors d’une conférence de presse son projet de nouveau concept pénitentiaire. Ce projet avait par ailleurs déjà été initié par son prédécesseur Luc Frieden.

Le ministre était accompagné par Hans-Jürg Bühlmann, expert suisse en matière pénitentiaire et Jerry Wallendorf, délégué du procureur général d’Etat à l’exécution des peines ainsi que par ses collaborateurs du ministère de la Justice. Le concept proposé est le résultat d’une collaboration intense entre les différents intervenants en matière pénitentiaire sous la guidance de l’expert externe.

François Biltgen a d’abord esquissé un état des lieux en présentant notamment des statistiques sur la population actuellement emprisonnée au Centre pénitentiaire de Schrassig. Le nouveau concept pénitentiaire repose sur une logique fonctionnelle chronologique se basant sur trois infrastructures distinctes, à savoir :

  • le centre pénitentiaire Ueschterhaff, dont la mise en service est prévue pour l’année 2017. Ce centre recueillera les personnes en détention préventive ;
  • le centre pénitentiaire de Schrassig, qui recueillera les personnes condamnées, et
  • le centre pénitentiaire de Givenich, qui continuera sa fonction de prison semi-ouverte.

Le ministre a exposé avant tout la philosophie proactive en matière de concept pénitentiaire qui s’écarte largement de l’approche réactive actuelle, approche qui vise uniquement l’enfermement du prisonnier dans l’attente de la fin de sa peine. La nouvelle conception vise d’abord à limiter les peines privatives de liberté au strict nécessaire et de remplacer des peines de prison par des alternatives tels que les travaux d’intérêt général ou la surveillance électronique. Pour les cas nécessitant une peine privative de liberté, il s’agit avant tout de préparer dès le départ et activement le condamné à sa réintégration en société.

Dans ce contexte, François Biltgen a surtout expliqué l’idée de normalisation de la prison et de la peine de prison. Cette normalisation, qui est une condition préalable nécessaire à la resocialisation, vise à aligner la gestion et le fonctionnement des prisons, dans la mesure du possible, à la vie en société et à responsabiliser le détenu dans un parcours individuel sur mesure afin de lui permettre une transition vers une vie responsable sans crime.

Ainsi, un contrat volontaire individuel et dynamique de resocialisation sera proposé au détenu. L’idée est de définir dans le contexte de ce contrat les droits du détenu à une réinsertion en société. En contrepartie, le prisonnier aura le devoir de coopérer activement à sa mise en œuvre compte tenu notamment de son état socioprofessionnel et de la description des objectifs de réinsertion à atteindre. La formation professionnelle, la formation continue, la mise au travail tout comme l’acquisition de compétences sociales sont autant d’éléments importants que p.ex. l’évaluation et le réexamen périodique du contrat convenu aux fins d’un ajustement éventuel.

La réconciliation avec les éventuelles victimes sera un autre élément important du concept de réintégration du détenu dans la société. François Biltgen a souligné que ce concept, bien qu’il trouve son origine et sa mise en œuvre initiale à l’intérieur de la prison, devra être continué en dehors de la prison dans le cadre d’un accompagnement et d’un suivi de qualité poussé.

Il nécessitera dans ce contexte aussi l’intervention d’externes non-étatiques tels que des ONG actives dans la mise au travail et dans l’hébergement. En effet, la prise en charge de la personne de l’ex-détenu se doit de prendre en compte sa situation sociale, familiale et professionnelle globale. D’un point de vue administratif et pratique il nécessitera aussi une intensification de la collaboration et de la coordination de l’ensemble des services étatiques intervenant dans le processus de resocialisation.

Hans-Jürg. Bühlmann est entré dans la suite dans le détail des aspects plus techniques du concept pénitentiaire, dont notamment les nouvelles infrastructures, la future A

dministration pénitentiaire et le rôle que continuera à jouer le parquet général dans le contexte de l’exécution des peines. Il a souligné dans ce contexte que le nouveau concept pénitentiaire constitue un réel changement de culture.

Dans ce contexte François Biltgen a soulevé qu’il ne s’agissait pas seulement d’assurer la sécurité à l’intérieur de la prison mais aussi et avant tout la sécurité après la prison dans le sens d’éviter au maximum la récidive. Voilà pourquoi la mise en œuvre du nouveau concept nécessite un accompagnement externe continu et une évaluation permanente. Une attention particulière sera portée aussi sur la mise en place de statistiques fiables, concernant notamment le phénomène de la récidive, et la réalisation d’une recherche scientifique pénitentiaire dont les objets seront définis par le gouvernement.

Le ministre de la Justice a souligné qu’il existait une différence manifeste entre la politique préventive, la politique pénale, la politique pénologique et la politique pénitentiaire et qu’il y aura lieu de bien séparer les débats à ces sujets afin de ne pas en faire un amalgame malsain. François Biltgen a en outre proposé à la Chambre des députés de tenir un débat d’orientation sur le nouveau concept pénitentiaire.

En fin de compte le ministre a affirmé que le concept pénitentiaire constitue une proposition qui sera finalisée après discussion avec les acteurs directement concernés. Le concept restera évolutif en ce sens qu’il sera adapté de manière continuelle aux évolutions en matière pénitentiaire. Le ministre compte saisir la Chambre des députés au courant de l’automne de l’année courante des projets de loi en question.

Il a aussi rappelé que le concept définitif ne sera opérationnel qu’à partir de la mise en service du Centre pénitentiaire Uerschterhaff en 2017, ce qui n’empêche en attendant pas la mise en place de projets pilote notamment au niveau de la resocialisation.

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